Au 46, rue Robespierre, une tête surgit furtivement de derrière un voilage blanc. Quelques instants plus tard, Monique Gaultier ouvre la porte de son appartement en rez-de-chaussée, jetant furtivement un œil de droite et de gauche. Elle referme aussitôt derrière son visiteur. « On ne sait jamais », lance-t-elle l'air inquiet.
Cette retraitée de 63 ans et son mari, Jean-Pierre, 67 ans, vivent dans ce logement social de trois pièces depuis six mois. « Je ne dors plus depuis qu'on est arrivés, avoue Monique. Un de mes voisins, un jeune d'une petite vingtaine d'année je crois, nous menace de mort. » Aujourd'hui, le couple est à bout.
Tout a commencé à leur arrivée. Après avoir vécu plusieurs années dans un logement social de la rue Alphonse-Baudin, le couple doit déménager. Monique a des problèmes de santé et ne peut plus grimper les quatre étages. Habitat 17, bailleur social, leur trouve alors un F3 en rez-de-chaussée, rue Robespierre. Ils sont ravis, mais déchantent bien vite.
Menaces, détériorations
Dès les premiers soirs, des jeunes, dont leur voisin, occupent le hall d'entrée toute la nuit. Jean-Pierre se décide, au bout de quelques jours, à ouvrir sa porte contre laquelle des coups sont donnés à intervalle régulier. « Je leur ai demandé de rentrer chez eux ou de faire moins de bruit, se rappelle-t-il. Mais ils m'ont répondu : "Toi, le vieux, tu nous fais chier. Retourne te coucher et si t'es pas content, vas en maison de retraite". » Monique regarde son mari : « Si on avait l'argent pour la maison de retraite, on ne serait pas dans un logement social. »
Puis ce furent les menaces. Les « On va te faire la peau, la vieille » se répètent jour et nuit, assortis de noms d'oiseaux. « Un soir, alors qu'une amie venue dîner chez nous a voulu repartir, les jeunes l'en ont empêchée. Ils sont restés dans le hall toute la nuit et bloquaient la sortie. Elle a dû dormir chez nous. »
La peur tenaille désormais Monique et Jean-Pierre. « Parfois, quand je reviens des courses, ils sont devant l'immeuble, décrit Monique. Ils m'encerclent, rient, se moquent de moi. J'ai peur qu'ils me frappent. » Et puis, ajoute la retraitée en voyant son époux entouré de ses deux petits chiens, « ce n'est pas Jean-Pierre qui pourra nous défendre contre ces jeunes, grands et forts. »
Mais cela ne s'arrête pas là. La bande de jeunes, une quinzaine d'après Chantal Murat, directrice de clientèle pour Habitat 17, dégradent et salissent les locaux. « Ils crachent par terre, lancent leurs bouteilles d'alcool vides, fument dans le hall, énumère Monique. Un jour, ils ont même jeté des excréments sur la vitre de notre appartement. » La voix de la sexagénaire se brise. Elle baisse les yeux pour masquer ses larmes. Jean-Pierre reste debout à ses côtés. Impuissant.
Du côté des autres locataires, la loi du silence semble s'être imposée. « Sans doute par égard pour la mère du jeune homme, avance Chantal Murat. Cela fait plus de dix ans qu'elle vit ici. Mais il dérange tout le monde. » La directrice de clientèle d'Habitat 17 va même plus loin. « Ce groupe de jeunes, qui se déplace d'immeuble en immeuble, pose un vrai problème d'ordre public, affirme-t-elle. Il est intolérable que des gens vivent dans cette situation, ils ont droit, comme la loi l'exige, à la jouissance paisible de leur habitat. »
Chantal Murat avoue que le « sentiment d'impuissance face à ce type de situation est terrible », aussi bien pour les habitants que pour le bailleur. « La médiation a échoué, Monique et Jean-Pierre Gaultier ont porté plainte et la police a convoqué le jeune homme, explique-t-elle. Mais, jusqu'à présent, je n'ai pas l'impression que les rondes de police aient eu un impact sur ces jeunes gens. »
Du côté de la police nationale, on estime qu'il n'y a pas de recrudescence de la délinquance dans le quartier de Villeneuve-les-Salines mais que « les rondes ont été renforcées ». Et, dans la mesure où une plainte a été déposée, « la police va faire son travail ».
Chantal Murat estime que seules quatre solutions peuvent conduire à la résolution du conflit. « Nous pouvons déménager les Gaultier. Nous allons leur proposer deux F3, l'un sur Villeneuve-les-Salines, l'autre à Aytré. Ce sera la fin de la peur pour eux, mais cela ne résoudra en rien le problème du 46, rue Robespierre. »
Pour la directrice clientèle d'Habitat 17, la meilleure solution serait un éclatement du groupe, « ce qui paraît visiblement impossible ». « Nous voyons avec les associations de quartier si un lieu de rassemblement peut leur être proposé, explique-t-elle. Ainsi qu'un suivi pour les amener vers la réinsertion. » Et si rien n'aboutit, ce sera la « solution extrême » : l'expropriation du jeune homme et de sa mère, par la constitution d'un dossier comprenant les dépôts de plainte des voisins, des éléments de preuves, etc. « Ce serait très long et douloureux. Nous aimerions ne pas en arriver là, insiste Chantal Murat. J'ai rencontré la mère du jeune homme qui prend peu à peu conscience du comportement de son fils, mais elle n'a aucun ascendant sur lui. »
Monique et Jean-Pierre attendent beaucoup d'Habitat 17. Ils ont hâte de reprendre une vie normale, « pour recommencer à voir famille et amis ».
http://www.sudouest.fr/2012/03/02/terrorises-par-une-bande-647820-3268.php
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