lundi 26 mars 2012

La mort tragique de l'assureur arrageois est plombée de silences

« Je veux connaître la vérité, quelle qu'elle soit, sur la mort de mon mari ! »
Depuis trois ans, la famille de Jacques Heusèle s'acharne à soulever la chape de plomb qui ralentit la recherche des causes de la mort de l'assureur. Affaire de moeurs ? Assassinat ? Nicole Heusèle et ses deux fils réfutent la thèse du suicide et accusent l'instruction d'inaction.

« On nous trompe depuis le début. » Ne parlez pas à Nicole Heusèle de police, française comme belge. Encore moins de justice.
Elle transpire la rage ravalée devant le bâclage de l'enquête « internationale », devant cette lente instruction qui passe de main en main. Ivre d'angoisse avant la découverte de la voiture, puis celle du cadavre qui a séjourné deux mois et demi dans l'eau, la famille traumatisée n'adhère pas un instant à la thèse du suicide, que d'aucuns lui ont suggérée dès le début de cette incroyable affaire.
Sur la place d'Arras, Jacques Heusèle donnait l'image d'un respectable assureur, doublé d'un fidèle rotarien. Le 17 novembre 2008, il prétexte un rendez-vous à Valenciennes pour s'éclipser de son agence, après un repas pris comme d'habitude à la maison. « N'éteignez pas l'ordinateur, je reviens ce soir », glisse-t-il à sa secrétaire. Le lendemain, il devait affronter un audit des inspecteurs d'Aviva, la maison mère ayant détecté dans les comptes un déficit de 150 000 euros.
Le lendemain à Erquelinnes, un bourg belge collé à Jeumont, l'éclusier est intrigué par une Mercedes flambant neuve, fermée à clé, stationnée sous un pont à quelques mètres de la frontière. Il alerte la police belge, qui contacte le commissariat d'Arras. Mais hélas, aucune commission rogatoire n'est lancée, aucun relevé d'empreintes ne sera effectué dans l'auto, s'étrangle après coup l'épouse. Le jour même, elle est auditionnée pour la première fois par les policiers arrageois. « J'ai été choquée, ahurie par toutes les rumeurs que le brigadier m'a rapportées : que Jacques était parti avec un homme, des prostituées, sous les cocotiers. J'ai cru que c'était pour voir mes réactions. »
Au fil des auditions, Mme Heusèle, qui croit son mari encore vivant, tombe des nues en réalisant qu'il la berne depuis des années. D'autant que les organismes de crédit la harcèlent. « J'ai appris qu'il avait douze prêts en cours au moment de sa disparition. Que la moitié de son salaire partait ailleurs depuis 2003. Alors que moi je devais faire attention au budget familial. »
Le 25 janvier 2009, à trente kilomètres de la frontière. Des mariniers voient une chaussure affleurer contre une péniche. Le cadavre de l'assureur est remonté de la Sambre, où il aura séjourné pendant plus de deux mois, lesté d'un haltère. En dérivant ? Pas sûr. Dans la famille, c'est l'effondrement, l'incompréhension.

Le troisième avocat est le bon

Les funérailles de Jacques Heusèle ont lieu le 31 janvier à Arras. Les pompes funèbres ont rendu le portable que la justice ne réclame pas, l'agenda où manque la page du funeste 17 novembre. Égarés pendant huit mois, par deux avocats, l'un arrageois, l'autre lillois « qui n'ont rien fait », la mère et les fils déposent au printemps 2009 une plainte contre X auprès du procureur à Arras. Pas de résultat. Le chemin de croix sera encore long.
Un an après les funérailles. La famille, à qui une relation amie de Jacques Heusèle avait conseillé « de se taire et de payer », est excédée par la mollesse des robes noires. Elle prend Me Bernard Méry, du barreau parisien, comme conseil. Il obtiendra des résultats, mais au compte-gouttes. Nouvelle plainte, à Béthune, en février 2010, pour chantage, vol et assassinat contre X. Classée sans suite en avril par le ministère public.
Obstiné, le trio Heusèle se constitue partie civile auprès du doyen des juges de Béthune. « On nous réclame une consignation de 4 000 euros, sans rapport avec nos ressources, pour commencer l'enquête », pestent la famille et l'avocat. Ce dernier fait des demandes d'actes : autopsie, téléphones, ordinateurs professionnels, comptes bancaires. La première juge d'instruction nommée justifie son refus par l'enquête, en cours.
Novembre 2010, le dossier atterrit sur le bureau d'une nouvelle juge. Elle n'ordonne que l'autopsie, pratiquée en février 2011. « Le médecin légiste n'a pas accrédité la mort par noyade parce qu'il n'y a pas de diatomées (algues microscopiques) dans les poumons », comprend la famille. En épluchant les autres agendas du mort, elle est intriguée par de nombreux prénoms féminins notés. Le mot « escort » figure ici et là. Elle se rend compte aussi que depuis 2005, l'assureur tournait en voiture entre Lille, Paris et la Belgique
http://www.lavoixdunord.fr/Region/actualite/Secteur_Region/2012/03/26/article_la-mort-tragique-de-l-assureur-est-plomb.shtml

Aucun commentaire: