mercredi 16 mai 2018

Marche blanche pour Naomi « Elle savait ce qu’elle voulait »

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Ce mercredi, au moins deux marches blanches, à Strasbourg et Paris, rendront hommage à Naomi Musenga, cette jeune mère morte aux urgences de Strasbourg le 29 décembre dernier, après avoir été raillée par une opératrice du Samu. Le dysfonctionnement d’un système, qui a suscité émotion et réactions dans toute la France, a relégué au second plan la personnalité d’une jeune femme de 22 ans qui aimait la vie, la mode, la musique et sa famille.
Née en 1995 à Strasbourg, Naomi était la septième d’une fratrie de huit enfants. Son père, Mukole, est pasteur évangélique, sa mère, Bablyne, aide-soignante. «  C’était une enfant remarquable par sa douceur, se souvient sa mère. Tous mes enfants ont leurs qualités particulières ; Naomi, c’était la douceur. »
« On nous lançait des cailloux et on nous insultait »
Petite, Naomi était timide. « Elle n’aimait pas être portée par quelqu’un d’autre que par un membre de sa famille. Elle était aussi déjà très créative, fabriquant des objets ou des collages, et dessinait beaucoup. »
Ses parents relatent une enfance que la couleur de sa peau a rendue difficile. « Il y a vingt ans, les familles noires à Illkirch étaient rares », rappelle Bablyne. Les enfants Musenga étaient en butte aux moqueries. « On nous lançait des cailloux et on nous insultait », raconte la sœur de Naomi, de 7 ans son aînée.
Celle-ci s’interposait parfois. « Elle avait besoin de protéger les gens qu’elle aimait. Elle a défendu une de ses amies qui était méprisée par les autres, à l’école élémentaire. » Le père renchérit : « Elle repérait les personnes qui étaient mises à l’écart par les autres et allait les encourager, qu’elles soient noires ou blanches. »
C’est au collège que Naomi a commencé à s’intéresser à la mode et aux vêtements. « Elle savait ce qu’elle voulait. Elle a préféré redoubler sa troisième pour pouvoir aller dans un lycée professionnel avec une filière métiers de la mode plutôt que de se voir imposer des cours de secrétariat, comme le voulait son professeur principal, se souvient Mukole Musenga. Elle pensait qu’il valait parfois mieux reculer pour mieux sauter. » Un père fier du parcours scolaire de sa fille.
«  Elle était incroyable, souligne sa sœur. Elle pouvait partir de vêtements ennuyeux et les transformer pour en faire des tenues très chics. Elle voulait lancer sa propre ligne de vêtements. » En attendant, la jeune femme travaillait comme vendeuse dans des boutiques de prêt-à-porter de Strasbourg en enchaînant les contrats courts.
Peu de temps avant sa mort, Naomi avait emménagé dans un immeuble neuf de CUS-Habitat, rue de la Thumenau. Les résidents se connaissaient encore mal, mais ceux qui ont croisé Naomi ne l’ont pas oubliée. « C’était une très jolie femme, indique Gulsane, sa voisine du dessus. On s’est rencontrées une fois, début décembre dans l’ascenseur, et on a parlé de nos enfants qui avaient le même âge. Elle serait venue me voir ce jour-là, je l’aurais emmenée aux urgences ! »
Comme ses frères et sœurs, Naomi avait appris à jouer d’un instrument de musique, en l’occurrence la batterie, qu’elle pratiquait au sein d’un orchestre. Tous les frères et sœurs de la famille Musenga chantaient également avec leurs parents des gospels, composés par les uns ou les autres.
Car la religion tient une grande importance au sein de la famille Musenga et l’aide à supporter l’épreuve de la disparition de la jeune femme. Le prénom que ses parents lui avaient donné, et qui signifie « gracieuse », faisait référence à l’histoire d’amour fidèle entre Ruth et Naomi dans la Bible. Pour Mukole et Bablyne, leur avant-dernière fille « incarnait notre attachement à Dieu ».
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