samedi 21 septembre 2013

Suicides autour des miss Roussillon : un pédopsy tente d’expliquer l’inexplicable

Deux suicides en moins d’une semaine à Pia avec comme point commun, des difficultés à assumer un deuil. La disparition d’Allison Benitez pour l’ancienne dauphine 2012 et le suicide de cette dernière pour le jeune homme de 20 ans. Chef des services de pédopsychiatrie et des urgences à l’hôpital de Thuir dans les Pyrénées-Orientales, Jean-Yves Galan tente d’expliquer l’inexplicable.
Qu’est ce qui peut pousser des jeunes de 19 et 20 ans à se donner la mort ?
C’est difficile à dire car je ne connais pas ces deux jeunes. Ce sont des faits qui trouvent des explications dans leurs histoires individuelles. Ce que l’on peut dire, c’est que chez les jeunes de 15-25 ans, le suicide est la deuxième cause de mortalité après les accidents sur la voie publique. On observe chez cette tranche d’âge une recrudescence des tentatives de suicide. Elles se sont mêmes effroyablement banalisées.


Les conduites auto-agressives sont aussi en hausse. Il s’agit pour eux de se soulager d’une douleur psychique trop importante et sur laquelle ils n’arrivent pas à parler. Après, la fin malheureuse d’un suicide est difficile à comprendre. Parfois on “réussit” sans le vouloir et parfois on se” rate” sans le vouloir non plus. S’il s’agit d’une pendaison, on peut penser que ces jeunes avaient vraiment envie d’en finir avec la vie.
Ces deux adolescents ont été frappés par le deuil. Cela peut-il expliquer leurs gestes ?
Le désarroi du deuil est classique. Freud disait que l’homme est un être pour mourir. Mais la plupart du temps, il n’y a pas de possibilités, même pour l’inconscient, de se représenter la mort. C’est tellement impensable et cela provoque un traumatisme insurmontable et inavouable que de s’apercevoir qu’on est soi-même mortel. Si on n’a pas un bagage narcissique solide pour affronter cette idée-là, on a du mal à en parler et donc d’avoir un retour sur ce sentiment. Or, est-ce quelque chose dont la société actuelle traite et parle de la mort, je ne le crois pas.
Les adultes sont mieux armés pour en parler ?
Pas forcément. Même pour les adultes, parler de la mort sans angoisse est difficile. Il faut être au clair avec sa propre angoisse de mort pour arriver à aider l’autre et lui apporter ce qu’il aurait besoin. Je suis intervenu à plusieurs reprises dans des classes après le suicide d’un élève ou d’un professeur : c’était des épreuves très angoissantes pour les enfants, surtout pour ceux qui avaient déjà été confrontés à la mort de l’un de leur proche. Dans ce cas-là, les souvenirs douloureux réapparaissent au grand jour. Leur tendance naturelle est de refouler la mort. Et quand ils y sont confrontés, sur qui ils peuvent compter, sur qui ils peuvent s’appuyer ? Pour certains, il vaut mieux alors sauter dans l’eau pour éviter la pluie.
Le grand danger reste donc la solitude ?
Effectivement, en soi-même on ne peut pas trouver de solutions face au chagrin et à l’absence de l’autre. Je ne sais pas s’ils ont pu communiquer quelque chose, s’ils ont pu compter sur quelqu’un, s’ils ont pu jeter une bouteille à la mer à travers internet. Mais surtout si ces gestes ont trouvé un écho.
Vous êtes déjà intervenu dans des cellules psychologiques ? Comment cela se passe-t-il ?
Oui régulièrement. Si on traite évidemment les personnes qui semblent le plus touchées, il est prépondérant que les intervenants psychologues aident les adultes à aider. Notre mission est courte, il faut que les adultes soient en mesure d’assurer l’écoute et la compréhension. Sans cela, une cellule de soutien psychologique n’a que très peu d’intérêt.

http://www.midilibre.fr/2013/09/20/suicides-autour-des-miss-des-pistes-de-reflexion,759752.php

Aucun commentaire: