mardi 31 juillet 2012

OISE Il y a 30 ans, le drame de Beaune

Le 31 juillet 1982, 44 enfants de Crépy-en-Valois (Oise) mourraient dans un accident de car sur l'autoroute A6. Marie-Andrée Martin a perdu trois enfants. Le temps n'a pas effacé la douleur.

Elle parle avec lenteur. Ses yeux se mouillent. Comment remuer des pierres aussi lourdes ? Un séisme. Le 31 juillet 1982, il y a tout juste 30 ans, l'accident de Beaune sur l'Autoroute A6 (Côte-d'Or) ôtait d'un coup la vie à 44 enfants des quartiers modestes de Crépy- en-Valois.

Ils étaient en route pour une colonie de vacances à Aussois, en Savoie. Marie- Andrée Martin avait envoyé quatre des siens. Trois ont péri sur les bancs du bus enflammé. Florence, 9 ans, Frédéric 11 ans, Bruno, 13 ans.

Leurs photos alignées sur le buffet de la salle à manger, au milieu d'une ribambelle d'autres portraits de gamins.

«L'aînée faisait partie des quinze rescapés. J'avais deux tout petits à la maison. En tant que maman on est bien obligée de vivre pour les autres. » Elle s'arrête un instant pour contenir une vague d'émotion. Puis reprend doucement : «C'est peut-être ça qui m'a sauvée. Et aussi l'association que nous avons fondée avec les parents qui en avaient la force.
Un magma douloureux dans lequel elle a égaré nombre de détails de la tragédie. La voix du maire de l'époque qui égrène un à un les noms des rescapés pour commencer. Pour elle, un seul sur la liste... «J'ai tout de suite compris pour les autres. »

Puis le départ précipité sur les lieux du drame, à bord d'un avion militaire parti de la base aérienne de Creil. Les regards échangés avec les autres parents effondrés.

En comptant ses neveux et nièces, l'accident a soustrait onze enfants à sa seule famille. Mais elle ne sait plus si la chapelle ardente était dressée à Beaune ou à Dijon. «Tellement de trous noirs », dit-elle.

Pour éviter l'insupportable aux mères et pères, les premiers élus arrivés sur place ont demandé que les corps soient enfermés dans un cercueil. Ginette Berhamel, en tant qu'adjointe au maire chargée des affaires sociales, avait été avisée en premier.

Un coup de téléphone aux premières heures du jour. «Je ne veux plus remuer tout ça », tranche-t-elle. Elle est restée à jamais marquée par l'odeur des petits corps brûlés dans des sacs plastique.

Le transporteur faiblement condamné


Les enfants avaient pris place à bord de deux bus d'un autocariste de Saint-Jean-de-Maurienne. À l'époque le transport des enfants est autorisé même les jours de grands chassés-croisés. Comme souvent, le choc est dû à l'imprévisible.

Mais le chauffeur du second bus qui s'est enflammé au contact d'une voiture au réservoir éventré était un occasionnel.

Pour cette faute inexcusable, le transporteur a été condamné à dix-huit mois de prison avec sursis et 25 000 francs d'amende (moins de 4 000 euros). Les parents n'ont jamais compris une telle mansuétude.

«À ce moment-là, il n'y avait pas de cellules psychologiques pour aider les gens, poursuit Marie- Andrée. Il a fallu attendre l'attentat du RER à Saint-Michel pour ça. Nous, on a été obligés de se débrouiller seuls. Des couples ont craqué. Mais le pire, ça a été pour les enfants et les ados rescapés. Les parents étaient enfermés dans une telle douleur qu'ils n'ont jamais pu être écoutés. »

La vie avec ses coups de bâton qu'il faut apprendre à apprivoiser. Marie-Andrée s'est reconstruite avec son association de Twirling. Ses filles, comme elle les appelle, ont fini championnes de France.

http://www.courrier-picard.fr/courrier/Actualites/Info-regionale/Il-y-a-30-ans-le-drame-de-Beaune

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