mardi 26 juillet 2016

Tinqueux: «Je n'ai pas vu ma fille depuis neuf mois»

Fanny Thiébaut aurait tout pour être heureuse. Un CDI, un appartement, des proches aimants : l’indépendance à 22 ans. Seulement la jeune femme vit un cauchemar.
Voilà neuf mois qu’elle n’a pas vu sa fille de 18 mois, Giulietta. «  Et je n’ai plus de nouvelles depuis trois semaines.  » En octobre 2015 au Mexique, son mari américain s’est enfui avec leur fille, traversant la frontière pour le Maryland. Depuis, Fanny Thiébaut se bat pour la récupérer.

Victime de violences

Comment aurait-elle pu imaginer cette déchirure, en arrivant comme jeune fille au pair aux États-Unis en août 2013, à 19 ans ? L’histoire avait commencé comme un rêve, dans le Maryland qu’on appelle « l’Amérique miniature », un concentré de vie où la Châlonnaise d’origine en prend plein les yeux. En 2014, elle rencontre Syavash Ayazi, un jeune mécanicien. «  Il ne passe pas inaperçu, par son physique et sa façon de parler.  » Sous le charme, elle tombe enceinte rapidement. Elle tombe aussi sous ses coups. C’est plus tard qu’elle apprendra par la police qu’il a fait de la prison pour violences. «  Il buvait beaucoup… Je n’avais pas de famille, pas d’amis sur place.  » Les grands yeux bruns de la frêle jeune femme s’embuent.
Elle fait appel à son père au Mexique, qui envoie de l’argent pour permettre au foyer de vivre. De survivre plutôt. La sœur du mari les a mis à la porte. Enceinte, Fanny connaît la vie sous tente, vend des effets personnels pour subsister. Après la naissance de Giulietta le 13 février 2015 et plusieurs mois de galère, la jeune femme rappelle son père. Direction le Mexique et un nouveau départ.
Le père loue une maison pour que le couple tente de reconstruire un cocon autour de Giulietta. «  Pendant deux semaines, c’était le paradis, reprend la jeune femme. Puis il a recommencé à boire.  » La bulle éclate ; les coups pleuvent encore. «  J’ai senti un déclic lorsqu’il a été violent avec moi alors que je portais ma fille. J’ai décidé de le quitter.  »
Se mettent en place, à l’amiable, des droits de visite. Jusqu’à ce matin-là. La veille, Fanny accepte de laisser Giulietta à son père pour la soirée et la nuit. Sauf que Syavash Ayazi en profite pour retourner aux États-Unis. Fanny ne le découvrira que le lendemain en entrant dans une maison vide et ravagée. Les autorités mexicaines confirment la sortie de territoire mais lui barrent la route. Son visa a expiré. «  Il le savait.  »

« Soulever des montagnes »

Elle prend contact avec l’ambassade américaine, dépose plainte pour kidnapping. Alors qu’elle pensait vivre le pire, son père décède peu après. «  Je suis rentrée en France le 5 décembre 2015 et ça a été très difficile… Physiquement, moralement, je n’ai pas pu faire quoi que ce soit pendant deux, trois mois.  » Se sentant aussi vide que la chambre d’enfant aménagée dans son appartement.
De nouveau sur pied mais toujours sans nouvelles de sa fille, elle appelle une avocate rémoise. Quand survient une éclaircie. Le père la contacte depuis le Maryland. Il dit être avec Giulietta et promet de la ramener pour son premier anniversaire. «  Il demandait de l’argent pour les démarches, il inventait tout et n’importe quoi.  » Désespérée, Fanny répond à ses sollicitations et lui envoie les dollars désirés. Régulièrement. Mais le père ne respecte pas sa promesse.
À peine lui laisse-t-il voir la petite à travers l’application de visioconférence Facetime. Quelques rares minutes de bonheur. «  Cette comptine française que je lui chante est le seul lien que j’ai établi avec elle, la seule chose qui doit lui faire penser que je suis sa mère…  », souffle-t-elle. Ces contacts lapidaires durent quelques mois. Jusqu’à découvrir la nouvelle petite amie du père de Giulietta : «  Elle avait l’air de parler de ma fille comme si c’était la sienne.  » «  Je ne peux pas vivre pleinement juste parce que je suis jeune et indépendante. Je suis aussi mère et je n’ai pas vu ma fille depuis neuf mois…  »
L’avocate de Fanny Thiébaut a déposé en juin une assignation au tribunal de Reims pour demander l’autorité parentale pour Fanny Thiébaut (lire par ailleurs). Déterminée, cette dernière est prête «  à aller la chercher moi-même s’il le faut  ».
Elle tente de construire sa vie dans l’attente de sa fille. «  Je passe le concours de la gendarmerie en septembre. J’ai une personnalité marquée mais cette histoire me donne une sacrée force. Je pourrais soulever des montagnes pour récupérer ma fille.  »
http://www.lunion.fr/node/773819

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