lundi 25 février 2013

Saint-Jean-de-Thurac. Enfant écrasé: le village en état de choc

La petite rue qui monte à l'église et à l'école est déserte. Un vent glacial la balaie. Il tombe quelques flocons, tout légers. Ici, vendredi, un petit ange s'en est allé. Sur le grillage de l'école, quelques roses sont accrochées. Au sol sur la chaussée, un trait rouge est dessiné depuis la veille au soir. Un trait en forme de cœur. Une classe est éclairée. À l'intérieur, seul, l'instituteur a les yeux rouges, la parole confuse. «La cellule psychologique est à Saint-Romain. Je vais y aller.»
C'est lui qui a accueilli les quelques enfants qui étaient descendus du bus en même temps que le petit garçon. Ils ont vu ce qu'il s'était passé. Ils n'ont pas forcément bien compris, surtout lorsque les ambulances sont arrivées.
L'école de Saint-Jean-de-Thurac est couplée avec celle de Saint-Romain-le-Noble. C'est un regroupement pédagogique. A Saint-Jean-de-Thurac, la classe accueille les grands, à Saint-Romain, les petits. Une navette assure le lien. Les parents attendent leurs enfants dans leur village respectif.

Permanence psychologique

La cellule psychologique à destination des parents, des élus, des professeurs, de tous ceux qui ont été choqués par le dramatique accident, s'est installée hier à Saint-Romain, à quelques lieues du drame. Les émotions sont encore trop fortes pour se retrouver là où le petit ange est parti. Pourtant, dès lundi matin, «la vie scolaire devra reprendre» disent les psychologues.
«Dès 8 heures nous serons présents à Saint-Jean-de-Thurac» indique la directrice d'Académie, Laurence Adeline, présente hier à Saint-Romain. Le conseiller général Christian Ferrullo, en charge des transports scolaires, sera également présent. Toute la semaine qui précède les vacances d'hiver, des psychologues, des enseignants supplémentaires, assureront une permanence dans les deux écoles. À la cellule psychologique, Jean Prouzet, effondré depuis la veille, accuse le coup. Comme tout le monde. Le drame est effroyable, injuste. L'accompagnateur des élèves dans le bus aussi est venu, avec son épouse. Le parent d'élève qui a pratiqué les premiers secours sur la petite victime, une mère aussi qui a assisté au drame. Elle est en larme, dit que ces enfants ne prendront pas le bus.
Et beaucoup d'autres parents. «J'ai prévenu tous ceux de ma commune et le maire de Saint-Romain a fait de même, pour les avertir de cette réunion aujourd'hui» explique Jean Prouzet. «Pour le moment, c'est la souffrance, mais dans quelques jours…» Le maire sait qu'il devra alors faire face à des réactions de colère. Lui aussi est papa.

Les parents bouleversés

Dans la salle des fêtes de Saint-Romain, la douleur est palpable. Par la porte laissée entrouverte, on entend les enfants jouer dans la cour. Le contraste est bouleversant. Un café est proposé aux parents qui se saluent, se serrent la main, certains se prennent dans les bras. Puis la réunion commence, très formelle. Et cette phrase qui revient, terrible : «La vie doit reprendre».
Une maman, la voix vibrante, demande «mon fils est né à un jour d'intervalle (NDLR : de la petite victime) Il était malade hier. Comment je vais lui annoncer cela ? Je ne veux pas qu'il ressente en moi cette détresse.» «Un enfant de 3 ans n'appréhende pas la mort comme un de 6 ans. Pour les plus petits, la mort n'est pas définitive» explique le docteur Verdier. «S'il vous le demande, il faut lui dire, simplement, que son camarade est mort.»
«Mon fils est dans la même classe. Il a assisté à l'accident. Il m'a dit hier que (NDLR la petite victime) allait bien. Comment lui dire ?» La nounou du petit ange est là aussi. Très choquée. Les psychologues la prennent à part.
La parole se libère dans la salle. Les parents critiquent la taille du bus. Il faut trouver une explication à ce drame. Quelques grands-parents sont venus. Après les premières émotions, ils osent un sourire en évoquant les moments passés avec leurs petits enfants. C'est sûr, la vie doit reprendre.

http://www.ladepeche.fr/article/2013/02/24/1568627-saint-jean-de-thurac-enfant-ecrase-le-village-en-etat-de-choc.html

Aucun commentaire: